Article dans les « Décideurs Magazine » – Mercredi 08 octobre 2025
Les boards des sociétés sont souvent conseillés par des comités qui émettent des recommandations sur des sujets incontournables pour les entreprises. Stratégie, RSE, nominations et rémunérations des dirigeants y sont passées au crible.
Lorsqu’une entreprise fait face à un scandale ou à une sortie de route, très souvent, une faille dans la gouvernance finit par être détectée. Code Afep- Medef , régulateurs et parties prenantes travaillent depuis plusieurs années à définir et à faire respecter les principes essentiels à la bonne marche des sociétés. Parmi les points de vigilance, le fonctionnement des conseils d’administration.
Pour que les administrateurs puissent prendre des décisions éclairées et accompagner utilement les dirigeants, une solution consiste en l’instauration de comités spécialisés sur les grandes questions qui se posent à eux. Qu’ils soient d’audit, de rémunérations, des nominations ou encore RSE, ces organes de réflexion jouent un rôle crucial dans la vie des entreprises.
Le Cac 40 bien équipe.
Denis Terrien , président de l’Institut français des administrateurs (IFA), explique que « dans un monde devenu de plus en plus complexe, les conseils d’administration se dotent d’un certain nombre de comités pour préparer les décisions. Ils n’en prennent aucune mais émettent des recommandations. » Le nombre et la structure des comités dépendent de chaque entreprise. Le groupe Accor, par exemple, en compte cinq permanents (comité des engagements, d’audit, de la compliance et des risques; des nominations et des rémunérations, ESG; de la stratégie internationale). Renault en dénombre trois, lesquels s’intéressent à l’audit et aux risques, à la gouvernance et aux rémunérations, et à la stratégie et au développement durable. Au sein du CAC 40 et du SBF 120, les entreprises disposent en général d’au moins un comité des rémunérations et des nominations et d’un comité d’audit et des risques.
« Dans un monde devenu de plus en plus complexe, les conseils d’administration se dotent d’un certain nombre de comités pour préparer les décisions ».
Une place pour la RSE.
La nouvelle version du code de gouvernance Afep-Medef publiée en 2022 a introduit une recommandation préconisant que les sujets relatifs à la responsabilité sociale et environnementale fassent l’objet d’un travail de préparation réalisé par un comité spécialisé, compte tenu de l’importance stratégique de ces thèmes. Un certain nombre d’entreprises doublent ce volet avec celui de la stratégie.
Selon le Baromètre des conseils d’administration publié en septembre par l’IFA et l’Ethics & Boards, 88 % des conseils du SBF120 disposent désormais d’un comité RSE/ESG, contre seulement 26 % en 2015. D’autres comités peuvent également être mis en place ponctuellement en fonction des besoins, comme cela fut le cas lors de la crise du Covid.
Des administrateurs responsables.
Pourquoi les entreprises de taille importante tendent de plus en plus à se doter de comités ? « Les administrateurs doivent se montrer compétents et vigilants pour prendre les bonnes décisions , souligne Denis Terrien. Il y a de nouvelles lois sur les responsabilités incombant aux membres des conseils d’administration. Les responsabilités centrales du conseil incluent les nominations et les rémunérations, la validation de la stratégie et du budget, le contrôle des risques et la communication financière. Cela implique un travail très important pour les membres des conseils, d’où la nécessité de préparer les dossiers lors de leurs réunions. »
Difficile, par exemple, pour tous les membres du conseil d’administration de faire passer des entretiens aux cinq à dix candidats à la succession d’un PDG. Le comité des nominations entre alors en scène pour s’en charger et émettre une à deux recommandations. Le comité des rémunérations, de son côté, veille à ce que celles-ci soient en cohérence avec le marché, les intérêts des actionnaires et la performance de la société. Il s’agit de trouver le bon équilibre afin de motiver les meilleurs tout en restant juste pour les autres parties prenantes. Les avis portent également sur le salaire fixe, la part variable, le plan d’attribution d’actions gratuites ou encore le plan de retraite. Sont-ils écoutés ? « Nous n’avons pas de chiffres sur le sujet , reconnaît Denis Terrien. Toutefois, on peut estimer qu’ils sont suivis dans 90 % des cas. »
« Quand il y a plus de quatre comités, on constate qu’il y a moins de discussions au sein des conseils d’administration »
Entre trois et quatre comités.
L’important pour les sociétés consiste à trouver la bonne proportion concernant le nombre de comités afin de servir au mieux la gouvernance de l’entreprise. « Quand il y en a plus de quatre, on constate qu’il y a moins de discussions au sein des conseils d’administration, qui deviennent alors surtout des chambres d’enregistrement des recommandations , prévient Denis Terrien. Mais sans eux, le conseil doit discuter de tous les sujets, ce qui paraît difficile. Le bon équilibre se trouve souvent entre trois et quatre comités. »
Qui les compose ? Il peut s’agir de membres du conseil d’administration mais aussi d’experts venus de l’extérieur. Dans tous les cas, une majorité d’administrateurs indépendants est attendue.
Lorsque l’entreprise est contrôlée par une famille, au moins deux personnes indépendantes devraient en faire partie pour un juste équilibre. En France, les boards des grandes sociétés sont composés pour près de la moitié de femmes et celles-ci sont plus nombreuses que les hommes à être présidentes de comité. Les profils peuvent être variés. Les membres ont toujours intérêt à se former ou rencontrer des homologues afin de partager les bonnes pratiques, comme le propose l’IFA à travers ses clubs de présidents de comités d’audit, et de comités des rémunérations et nominations. Une bonne gouvernance repose sur de nombreux échanges, en interne comme en externe.
Olivia Vignaud
par Lucas Jakubowicz