Transposition de la directive WoB en France : Intégration des représentants des salariés et actionnaires salariés dans les quotas de genres dans les conseils

 

Ordonnance n° 2024-934 du 15 octobre 2024 : JO du 16 octobre 2024

Transposition de la directive Women on Boards : les quotas de représentation femmes-hommes dans les conseils d’administration incluent désormais les administrateurs salariés et les salariés actionnaires.

 

Une ordonnance, publiée au Journal officiel le 16 octobre 2024, a été émise en vertu de l’article 5 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024, dite loi DDADUE 2024 (Dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne). Cette loi autorise le Gouvernement à adopter, par voie d’ordonnance et dans un délai de six mois après sa promulgation, des mesures pour transposer la directive (UE) 2022/2381/UE. Cette directive, connue sous le nom de Women on Boards (WoB), vise à promouvoir un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes dans les conseils d’administration des sociétés cotées et comprend diverses mesures connexes.

 

Objectifs de la directive européenne

Adoptée le 23 novembre 2022, la directive WoB impose aux grandes entreprises cotées, employant plus de 250 salariés et réalisant un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros ou disposant d’un total de bilan de 43 millions d’euros, de respecter des quotas de représentation des femmes et des hommes dans leurs conseils d’administration. Les entreprises doivent se conformer à l’un des objectifs suivants d’ici au 30 juin 2026 :

  • Au moins 40 % des postes d’administrateurs non exécutifs occupés par des membres du sexe sous-représenté ;
  • Ou au moins 33 % de l’ensemble des postes d’administrateurs (exécutifs et non exécutifs) occupés par le sexe sous-représenté.

En cas de non-conformité à ces objectifs, les entreprises devront :

  • Ajuster leurs processus de sélection des administrateurs  ;
  • Publier des informations sur la représentation des sexes dans leurs conseils ;
  • Mettre en place des mesures pour atteindre les objectifs fixés.

Les entreprises devront ajuster leurs processus de sélection des administrateurs et publier des informations sur la représentation des sexes au sein de leurs conseils d’administration ainsi que sur les mesures prises pour atteindre ces objectifs.

 

Entrée en vigueur progressive

L’ordonnance prévoit une entrée en vigueur progressive des mesures. Les sociétés relevant directement de la directive doivent être conformes au 30 juin 2026, tandis que celles hors du champ d’application de la directive bénéficieront d’un délai supplémentaire jusqu’au 1er janvier 2027 pour se conformer aux nouvelles exigences. Ce délai vise à permettre aux entreprises d’adapter leurs statuts, notamment en concertation avec la représentation des personnels.

En revanche, les sociétés dont les statuts prévoient l’élection des représentants des salariés en 2025 peuvent appliquer les nouvelles dispositions dès l’entrée en vigueur de l’ordonnance au 1er janvier 2026.

 

Transposition de la directive WoB en France

Intégration des représentants des salariés et actionnaires salariés

La transposition de la directive WoB dans le droit français introduit un changement majeur en intégrant les administrateurs représentant les salariés et les salariés actionnaires dans le calcul des quotas de représentation des sexes. Ces administrateurs n’étaient pas inclus dans le calcul des 40 % imposés par la loi Copé-Zimmermann, mais ils devront désormais l’être.

Conformément à la directive, deux collèges distincts sont mis en place pour appliquer la règle d’équilibre :

  • Les administrateurs représentant les salariés actionnaires, désignés par l’assemblée générale, sont intégrés au collège des administrateurs de droit commun.
  • Les représentants des salariés, désignés selon des modalités spécifiques (élections, syndicats, etc.), forment un collège distinct, et les règles d’équilibre leur sont appliquées en fonction de leur mode de désignation.

Cas des sociétés à participation publique

Les sociétés à participation publique, qui relèvent du champ d’application de la loi Copé-Zimmermann, sont également concernées. L’ordonnance prévoit l’adaptation de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 sur la gouvernance des entreprises publiques, afin de respecter les règles spécifiques issues de la loi de 1983 relative à la démocratisation du secteur public. Cette adaptation vise à intégrer les administrateurs représentants des salariés dans le calcul des quotas.

 

Les nouvelles obligations pour les entreprises françaises

L’ordonnance n° 2024-934 modifie le Code de commerce pour intégrer les nouvelles obligations suivantes :

  • Prise en compte des administrateurs représentant les salariés et des salariés actionnaires dans le calcul des quotas de représentation des sexes  ;
  • Obligation de publication des informations relatives à la représentation des sexes au sein des conseils d’administration et des comités exécutifs ;
  • Sanctions en cas de non-conformité, avec des mesures pouvant inclure l’annulation des nominations non conformes.

 

La France, pionnière dans l’égalité femmes-hommes au sein des instances dirigeantes

La France a été précurseur dans la promotion de l’égalité de genre dans les conseils d’administration avec l’adoption de la loi « Copé-Zimmermann » en 2011, bien avant l’adoption de la directive européenne. Cette loi impose aux entreprises de plus de 250 salariés, avec un chiffre d’affaires ou un total de bilan d’au moins 50 millions d’euros, de garantir un minimum de 40 % de femmes ou d’hommes dans leurs conseils d’administration.

Cependant, la loi Copé-Zimmermann ne prenait pas en compte les administrateurs salariés et salariés actionnaires dans le calcul des quotas. C’est précisément sur ce point que la directive WoB introduit le plus grand changement pour la France. Désormais, les administrateurs salariés et les salariés actionnaires doivent être inclus dans le calcul des 40 % de représentation du même genre, ce qui constitue un ajustement majeur pour les entreprises françaises.

En 2021, la loi « Rixain » est venue renforcer cet engagement en étendant l’exigence de parité aux postes de direction, ce qui témoigne de la volonté de la France de promouvoir une gouvernance équilibrée à tous les niveaux des entreprises.

Cette dynamique se reflète dans les chiffres récents publiés par le Baromètre IFA – Ethics & Boards, qui montre que la représentation des femmes dans les conseils d’administration des entreprises du CAC 40 et du SBF 120 a atteint respectivement 46,7 % et 46,4 % en 2024, bien au-delà du seuil de 40 % imposé par la loi Copé-Zimmermann.

 

Pour aller plus loin : Baromètre IFA-Ethics & Boards de la gouvernance responsable 2024